HENRIETTE TE DEUM (Parle à mes Docs, mon cœur est ailleurs…)

Publié le par Lessaim

 

 

Ci-gît Henriette Mauvaise-Foi, de peu de foi ; ne priez pas pour elle.

Elle est morte comme elle a vécu. En le faisant savoir. (Vous pouvez enlever vos boules Quiès, d’ailleurs.)

On l’a enterrée avec ses Docs – les roses, celles qui portent encore les dents du curé. Ou de l’instit, je sais plus.

Ah ! Chère Henriette… On ne l’a pas enterrée avec sa mauvaise humeur : elle est partie avec. Il pleut des anges, déjà. Tous : la croupe encore fumante des premiers coups de savates. Ça se dépeuple au sommet. Signe qu’Henriette est bien arrivée.

J’ai dans l’idée que l’hiver sera rigoureux.

Que savons-nous, d’Henriette ?
Dans le fond ?
Puisqu’on est entre nous, là ?
Hein, qu’est-ce qu’on sait ?
Je vais vous le dire, moi : pas grand chose.
Mais nous savons l’essentiel. C’est-à-dire ce qu’elle a inventé à notre intention.
Nous ne connaissons que ses mises en scènes : c’est un boulevard vers son intimité. Et je parle de ses rêves, là, pas de son cul. Ce qu’elle laisse dans l’ombre, elle le suggère en mettant le reste en lumière. On la devine par défaut. On la scrute dans son dos pour mieux la voir de face.
Nous connaissons son personnage, c’est-à-dire le faux-semblant. Le mensonge fait la blague. Elle a l’habileté des camelots. La gestuelle est précise. Elle est de ces femmes qu’on aime entre les lignes, parce qu’elle n’aime pas qu’on l’aime au vu de tout le monde.

 

 

tombeRillette.jpg

 

 

Ci-gît Cheftaine-Rillette. Elle avait deux seins auxquels se vouer, suffisamment pulpeux pour s’y vouer à plusieurs. Nos vie ne sont plus les mêmes, nos bouches abandonnées crient famine. Et nos mains baladeuses, maintenant sédentaires, ont déjà un doigt dans la tombe.

Je viens d’apprendre qu’elle est canonisée, ce qui ne veut pas dire qu’elle va servir de chair à canon – c’est, hélas, le privilège des vivants.
Non : à nous, petits clébards à la queue frétillante, cabots perdus dans la nuit mortifère, passant leurs vie blanche à regretter le sommeil… A nous, donc, Henriette dispensait ses attentions. Elle est – comme on le comprend – devenue Sainte-Henriette-Des-Chiens-D’aveugles.

Ça promet.

 

 

aveugle.jpg

 

 

 

 

J. Fansten

 



Publié dans Défis

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
T
<br /> J'ai déjà commenté chez toi : une perle, rien à ajouter. Mais franchement, elle n'a rien fait de si terrible pour mériter le Paradis.<br /> <br /> <br />
Répondre
M
<br /> Je me lasse pas de le relire!<br /> <br /> <br />
Répondre
P
<br /> la voilà enterrée en grandes pompes...<br /> hein ? quoi ? qui l'a déjà faite ? quand ? 'taaaain... je me fais toujours avoir avec les bonnes blagues...<br /> dommage que je sois immortelle, j'aurais aimé ce genre d'oraison...<br /> <br /> <br />
Répondre